Un 360° narratif, c’est possible !

Par Hélène Rahier

Dans cet article, Hélène qui se forme aux Pratiques Narratives avec la Fabrique, revisite une pratique professionnelle en osant rendre narratif un questionnaire de type 360, inspirée en cela par les campagnes de lettres que Steven Madigan (Vancouver) nous avait appris à faire lors de nos premières masterclasses arcachonnaises… Tous ces enseignements nés au bord des océans, d’Adelaide à Vancouver en passant par Arcachon, forment des vagues puissantes et je ne suis pas étonnée qu’une bretonne surfe aujourd’hui dessus avec talent, souci de l’autre, exigence professionnelle et délicatesse ! Catherine.

Dans le cadre de mes accompagnements bilan de compétences, je suis amenée à adresser un questionnaire à l’entourage. Il a pour objectif de recueillir une vision extérieure des caractéristiques des bénéficiaires de la démarche. Et cet exercice, à mon tour, me questionne.

Atouts, réussites, qualités, axes de progrès… Mêmes ouvertes, qu’apportent ces questions ? Des mots vides de sens car déconnectés d’un environnement, d’un contexte, d’une situation. Que m’apprennent ces réponses sur les personnes que j’accompagne ? Non, ce n’est pas la bonne formulation. Qu’apprennent-elles aux personnes que j’accompagne ? Des mots déjà entendus, certains touchés du doigt, ils éclatent aux yeux des personnes qui reçoivent : éclairants pour certaines, avec un sourire en coin de satisfaction pour d’autres, sans vraiment comprendre parfois, ressentis blessants quelquefois. La lumière des réponses ne met pas forcément en valeur les zones à sortir de l’ombre. Flûte !

Lors des séances de restitution, je remets de la perspective avec elles pour débusquer un autre angle de vue afin d’envisager une compréhension en lien avec leur réalité. Mais suis-je dans le vrai ? Vraiment cet exercice est délicat. Par ailleurs convaincue de son utilité, le fond et la forme ne me conviennent décidément pas. Refait maintes fois, le questionnaire me laisse à moitié satisfaite à chaque fois…

Puis, je me forme avec envie aux pratiques narratives. Les mots, le sens des mots, les grandes histoires, les petits récits, tout « ça » me parle. J’expérimente alors la énième refonte de ce questionnaire et me repose la question de l’intention : à quoi ça sert ? À qui ça sert ?

Je formule une première série de questions. Trop orientées pour qu’elles soient justes. Je me mets à la place de la personne qui répond : que va-t-elle penser de ce questionnaire différent ? Encore une fois, je crois que ce n’est pas la bonne question à me poser. Aura-t-elle plaisir à y répondre ? Trouvera-t-elle à répondre ? À qui est-ce destiné ? Que vont apporter ces réponses à la personne accompagnée ? Pour le savoir, teste-le ce questionnaire, arrête de tourner en rond !

Voici venue la première fois – clic – c’est parti !

Je surveille avec impatience, curiosité et appréhension (oui, un peu) les retours à ces nouvelles questions : Racontez une anecdote détaillée et sympathique que vous partagez tous les deux – Au vu de cette anecdote, que diriez-vous de ce qui vous plaît chez elle ? Que lui reconnaissez-vous comme talents ? / Racontez une situation professionnelle la concernant qui vous a marquée – Au vu de cette situation évoquée, que pensez-vous de ce qui est important pour elle ?

Wahouh ! Je goûte avec avidité les mots qui mettent en scène la personne que je crois connaître un peu puisque nous travaillons, conversons depuis plusieurs semaines. Je suis émue, je ris doucement aux anecdotes, bien détaillées pour certaines, qui me racontent toutes les autres belles facettes que j’ignorais jusque-là. Les petits récits prennent vie et colorent la grande histoire. Quelle richesse pour moi, certes, mais pour elle ! Les répondants parlent tous de leur ami, collègue, membre de la famille avec un angle à chaque fois varié qui fait résonner ses belles valeurs, compétences, qualités ou talents. La contextualisation donne du sens à qui reçoit, elle donne à comprendre.

Et vous savez quoi ? C’est la première fois que je suis pleinement satisfaite de ce questionnaire dans l’utilité qu’il apporte aux personnes accompagnées.

La douceur des pratiques narratives passe d’une perception à une concrétisation. Les récits donnent à voir de l’authenticité, et ça, c’est plutôt chouette !

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